La Graine de la foi

Évangile selon saint Luc 17, 1-6

En ce temps-là, Jésus disait à ses disciples : « Il est inévitable que surviennent des scandales, des occasions de chute ; mais malheureux celui par qui cela arrive ! Il vaut mieux qu’on lui attache au cou une meule en pierre et qu’on le précipite à la mer, plutôt qu’il ne soit une occasion de chute pour un seul des petits que voilà. Prenez garde à vous-mêmes ! Si ton frère a commis un péché, fais-lui de vifs reproches, et, s’il se repent, pardonne-lui. Même si sept fois par jour il commet un péché contre toi, et que sept fois de suite il revienne à toi en disant : “Je me repens”, tu lui pardonneras. »
Les Apôtres dirent au Seigneur : « Augmente en nous la foi ! » Le Seigneur répondit : « Si vous aviez de la foi, gros comme une graine de moutarde, vous auriez dit à l’arbre que voici : “Déracine-toi et va te planter dans la mer”, et il vous aurait obéi. »

Prière

« Tu me scrutes, Seigneur, et tu sais ! Tu sais quand je m’assois, quand je me lève ; de très loin, tu pénètres mes pensées. Que je marche ou me repose, tu le vois, tous mes chemins te sont familiers. » (Ps 138, 1-3)
Comme un enfant contre sa mère, mon âme se tient devant toi, Seigneur (cf. Ps 130, 2)

Demande

Empêtrés dans le péché, nous avons tant besoin de toi, Seigneur. Arrache en nos cœurs la déchéance et implante en nous la graine de la foi.

Réflexion

1. « (…) qu’on lui attache au cou une meule de pierre (…) »
   En prononçant ce sévère avertissement, Jésus ne se complaît pas à nous menacer de châtiments sordides. Il prononce une sentence préventive, non seulement en vue de la sauvegarde de l’âme d’une potentielle victime « scandalisée » (dont la vie sera ruinée et son éternité en péril), mais aussi en vue du salut éternel de celui qui se laisserait tenter. Il vaut mieux être noyé dans la mer qu’englouti en enfer, comme le suggère la vision de l’Apocalypse : « Alors un ange plein de force prit une pierre pareille à une grande meule, et la précipita dans la mer, en disant : Ainsi, d’un coup, sera précipitée Babylone, la grande ville, on ne la retrouvera jamais plus. » (Ap 18, 21)
   Le scandale n’est pas le fruit d’une génération spontanée : il commence par un faux témoignage. C’est le discours du « serpent des origines », un mensonge qui s’insinue dans notre pensée : « vous ne mourrez pas : vous serez comme des dieux. » Cela se traduit, soit en des actions qui crient au scandale, soit, pire encore, dans l’omerta vis-à-vis de ceux qui avertissent.
2. « Si ton frère a commis un péché, fais-lui de vifs reproches (…) »
   Ce mandat du Christ a pour corollaire : « (…) et, s’il se repent, pardonne-lui. » N’est-ce pas là une bonne nouvelle du salut ? Le salut, quoique gratuit, n’est pas bradé ; la perle de la grâce n’est pas jetée aux cochons, c’est-à-dire nos dispositions frivoles et imperceptiblement irrévérentes. Elle doit être confrontée par une semonce.
   Mais que veut dire « s’il se repent » ? Si l’on imagine une confession sacramentelle bâclée, le pénitent n’est justifié qu’en façade et le ministère du pardon est profané. La vie doit changer radicalement, c’est-à-dire à la racine, le cœur. Cette conversion s’étale dans le temps : elle doit rejoindre les innombrables strates d’une âme façonnée par son histoire : les habitudes mentales, comportementales, les blessures du cœur reçues ou auto-infligées par le péché, la connaissance plus ou moins intime de l’amour du Christ. Nul ne peut le voir de l’extérieur, nul ne peut en juger, hormis l’Esprit de Dieu : « Tu me scrutes, Seigneur, et tu sais (…) » (Ps 138, 1).
3. « Si vous aviez de la foi, gros comme une graine de moutarde (…) »
   L’effet que Jésus met en perspective n’est pas à la portée de l’homme ; c’est une œuvre surnaturelle. Elle implique une grande communion de volonté avec Dieu, comme celle du Fils à l’égard de son Père. Elle implique aussi la transformation de la vie et sa reproduction, pour que le disciple contribue au déploiement du Règne de Dieu.
   Il ne nous échappe pas que la graine de moutarde contient un dynamisme vital. Une semence qui se déploie dans le temps. Nous comprenons bien qu’il s’agit d’une puissance spirituelle, non de la force mentale ni d’inventivité humaine. Une Parole éternelle semée dans les cœurs pour l’accomplissement des desseins de Dieu. Enfin, n’oublions pas que l’effet de la foi (l’arbre déraciné) n’est pas destiné à notre propre gloire, mais à celle de Dieu. Il est ordonné à la béatitude éternelle, non au succès ou au bien-être temporels.

Dialogue avec le Christ

Merci, Seigneur Jésus, pour la lumière qui émane de ta Parole. Elle éclaire mon âme et purifie mon cœur. Elle m’entraîne à emprunter les chemins d’éternité, au milieu des affaires du temps, et à fuir les occasions de péché. Je te rends grâce de m’avoir appelé au sein de ton Église à être ton disciple, missionnaire, porteur de ta sagesse, et de faire connaître la joie d’être sauvé.

Résolution

Aujourd’hui, je veux écouter avec humilité les remarques, les avis ou les opinions qui diffèrent des miens, et je rejette de ma pensée toute saveur d’amertume au d’autojustification.

Père Jaroslav de Lobkowicz, LC